mercredi 23 octobre 2013

D'autres Royaumes - Richard Matheson

Les lectures d’Audham et d’Eileen se croisent parfois… elles vous proposeront alors des critiques écrites en commun (sous le libellé Le Vent souffle du Nord sur le blog Echos d'Outremonde, remplacé ici par le libellé Lunes Jumelles) Voici la première, à l’occasion de la disparition de Richard Matheson. 


Né en 1926 et décédé le 23 juin dernier, Richard Matheson est un des auteurs les plus importants des littératures de l’imaginaire, que ce soit par le nombre, la qualité de ses écrits ou simplement son influence sur la culture populaire. En effet, son imaginaire angoissant - traitant de thèmes universels tels que la folie, l’abandon, la mort, la solitude - a donné lieu à une série de classiques de la littérature fantastique ainsi qu’à de nombreux scénarios. Outre les romans restés légendaires (L’homme qui rétrécit, Je suis une légende, Le jeune homme, la mort et le temps, Journal des années poudre), il est également scénariste de séries à succès (Star Trek, la 4ème dimension) et de Duel, le premier film de Steven Spielberg. Justement récompensé par les prix qu’il a reçu au long de sa carrière, Stephen King lui-même lui reconnaît un grand rôle dans la genèse de son œuvre, et déclaré qu’il lui a “montré le chemin.”

Je l'ai lu : 
Étonnant donc ce dernier ouvrage,1er inédit depuis 10 ans et sans conteste plus fantasy qu’horreur ou que fantastique. Le narrateur - un avatar de l’auteur ? - nous raconte comment, en 1918, une rencontre dans les tranchées de la guerre va changer le cours de sa vie le conduisant, après-guerre dans un village à l’accueil ambigu. De là, de ce contexte ancré dans le réel, on bascule doucement dans la fantasy : perceptions de sensations étranges, objets qui disparaissent, se transforment, contes à dormir debout relayées par les villageois, envoûtements… Puis une balade en forêt, la rencontre d’une veuve aussi charmante qu'inquiétante (et dont on dit évidemment que c’est une sorcière), la rencontre d’une fée et de son monde, un amour impossible et le lecteur bascule, avec le narrateur dans “d’autres royaumes” qui changeront son existence. 
Ce qui m'intéresse dans ce genre de récit c’est le passage du monde “réel” au monde “féerique”. Habituellement, c’est en littérature fantastique que le lecteur voit consciemment ce passage ; en fantasy la tendance serait plutôt d’entrer de plein pied, dès le début, dans un monde féerique, avec ses codes propres. Ici donc, Matheson, par un récit quand même emprunt de fantastique arrive à nous faire basculer dans le merveilleux. Au-delà de cet aspect littéraire, j’ai l’impression d’avoir attendu que quelque chose arrive. Les péripéties du héros (ses rencontres, les objets magiques qu’on lui donne, les trahisons, etc.) m’ont amenée à attendre une sorte de révélation, un moment fatidique sans jamais l’avoir. Au bout des 286 pages, une impression d’avoir fait une jolie ballade mais une impression d’inachevé tout de même. Mon avis reste donc mitigé sur cet ouvrage.

D'autres Royaumes / Richard Matheson. J'ai Lu, 2013. 18 €.
Audham l’a lu : 
Qu’on se le dise, Matheson aura eu bien souvent la plume habile. Ses œuvres ont marqué le paysage fantastique par leur mélancolie et leur habileté à placer les humains face à de douloureux choix. Que ce soit le dilemme amoureux vécu par le jeune homme du Jeune Homme, la mort et le temps, où la dureté du monde du Journal des années de poudre, en passant par l’horreur permanente de Je suis une légende, il aura entraîné ses lecteurs à la suite de ses héros, et leur aura fait vivre maints tourments. Il aura toujours hésité à faire commerce de son talent d’écrivain, et essayé un peu, dans des tentatives vite oubliées par ses lecteurs déçus. 
C’est l’année de sa mort, après quasiment 10 ans de silence, qu’il a livré ce texte curieux qu’est D’autres Royaumes. Notre narrateur est un double malicieux de Matheson lui-même, devenu écrivain (non de fantasy mais d’horreur) par confort, parce que cela se vendait mieux. Âgé, il parle de l’écriture, et de ses œuvres passées avec cynisme, et seul le passé féérique, merveilleux, qu’il a vécu plus jeune semble trouver grâce à ses yeux. Ce passé où tout était possible, où les fées et les sorcières existaient, et où le narrateur, pur et inexpérimenté, était plus libre. Mais ce passé lui-même, annoncé comme merveilleux déçoit et sonne faux : tout semble dissonant dans cette histoire, et même les beaux moments cachent difformité et corruption. Malgré son tour charmeur, et ses descriptions ravissantes, D’autres Royaumes est un roman crépusculaire où les sorcières sont vieillissantes, les fées et les enfants sont morts, et le seul vrai bonheur est le souvenir d’un passé peu crédible. Un roman qui ne croit en aucune magie, ni la mauvaise, corruptrice, ni la bonne, risible, et qui finalement ne court que vers la mort. Un bien étrange roman, donc, qui semble raconter une charmante et mélancolique histoire, et dit finalement tout à fait autre chose, comme une rose dont le parfum masque la progressive décomposition.
D’autres Royaumes est à aborder comme un étrange testament, sans doute révélateur des opinions de son auteur.

jeudi 10 octobre 2013

Le Secret dévoilé : enquête sur les mystères de Rennes-le-Château - Christian Doumergue

Il est des livres passionnants. Complexes, farfelus mais passionnants. C’est le cas du livre de Christian Doumergue, Le Secret dévoilé : enquête sur les mystères de Rennes-le-Château.

Mais commençons par la petite histoire. Un matin de mon adolescence, je m’abrutis devant la télé et "zap-zap", je tombe par hasard sur une chronique de télé-matin où le chroniqueur expose les mystères de Rennes-le-Château.
Pour faire court : non loin de Carcassonne est le village perché de Rennes-le-Château ; au début du XXème siècle, y est nommé un curé, l’abbé Béranger Saunière. Celui-ci va d’abord rénover de façon majestueuse l’église de son village puis fera construire toute une série de bâtiments : une tour, une villa agrémentée d’un parc, jardins et animaux exotiques inclus. Évidemment “on” s’interroge : comment, avec sa seule solde de curée de campagne, l’abbé Saunière peut-il financer ces travaux ? Et si, lors de la réfection de l’église il avait trouvé un trésor ?
L’affaire ressort ensuite dans les années 60 et a pris depuis une ampleur considérable, attirant sur le plateau foule de chercheurs de trésor et de mystiques en tout genre.

L'abbé Béranger Saunière

Le livre de Christian Doumergue, à son tour “prisonnier” du mystère, décortique ce que l’on appelle depuis “l’affaire Saunière”. Son travail est à la fois celui d’un historien et celui d’un diplômé d’études littéraires, sachant différencier le symbolique du premier degré et autres tours de passe-passe littéraires et philosophiques. Il nous emmène donc bien au-delà du mythe de Rennes. Faire un résumé de toutes les “découvertes” apportées par cet ouvrage serait plutôt complexe, d’autant plus que j’ai personnellement des difficultés à retenir les “liens” entre chaque point. Mais vous aller voir que nous nageons en plein Da Vinci Code.

Commençons donc par être certains que la plupart des points avancés par Christian Doumergue sont des théories et que lorsque celles-ci ont été posées comme des vérités c’est que l’auteur les a vérifiées de façon historique.

Je vous passe les détails des recherches effectuées (le livre de Christian Doumergue fait ça très bien en quelques 630 pages) et ne vous résume ici donc que les “révélations”.
Attention "Spoiler":
{Tout commence avec le Secret de l’abbé Saunière, début XXème : les fonds de l’homme d’église venaient en fait de donations... L’affaire, refait surface dans les années 60 où, déjà, la rumeur court, celle d’un secret plus important trouvé à Rennes-le-Château, un secret d’ordre religieux. Doumergue nous apprends que la plupart de ouvrages traitant alors du sujet ont été écrits par les hommes de paille d’un certain Pierre Plantard, homme de l’ombre, pétri de mysticisme depuis sa plus tendre enfance. L’auteur va alors se rendre compte que “l’affaire de Rennes” est, en partie, un mythe monté de toute pièce et entretenu par Pierre Plantard pour faire passer ses idéologies. La grande croyance de Plantard est que toutes les religions proviennent d’une seule et unique religion primitive, celle du peuple de l’Atlantide. Et que (oui, c’est très raccourci) les Atlantes, ce peuple primitif - ou en tout cas les premiers hommes - auraient rencontrés sur Terre une autre humanité, une autre “race” d’humain, venue d’une autre planète. Et ceux-ci ce serait mélangés à nous donnant naissance à une lignée supérieure… lignée dont Jésus Christ ferait partie (il n’est donc pas de nature divine mais bien humain, quoique supérieur ; de plus son enseignement ne serait qu’un dérivé de la religion Atlante) Les autres membres de cette lignée composeraient certaines sociétés secrètes, comme la Rose-Croix, dont la mission est de garder cachées ces connaissances pouvant bouleverser l’ordre des choses établies, les religions et l’humanité toute entière. A cela s’ajoute la petite histoire de Jésus : Marie-Madeleine serait son épouse et elle aurait ramené le corps de Jésus en France lorsqu’elle y serait venue elle-même. S’en suit que le “secret” de Rennes-le-Château, résiderait en un temple souterrain, sur un modèle de temple atlante, où girait le corps de Marie-Madeleine (et de Jésus ?) Et l’auteur, d’être convaincu que Plantard aurait vu de ses yeux ce temple… qu’il reste à retrouver pour avoir des confirmations de toutes ces théories.}


Alors oui, beaucoup de chose font sourire (surtout l’idée d’une humanité extraterrestre) mais après tout, on nous a bien enseigné que Jésus marchait sur l’eau, ce n’est pas plus farfelu.
L’ouvrage de Christian Doumergue peut susciter beaucoup de chose, du sourire à la colère. Il a au moins le mérite d’être plutôt convaincant, démontrant une méthodologie de recherche historique pointue et n’affirmant rien qui ne soit vérifié. De toute façon, que l’on “croit”, que l’on adhère ou pas à toutes ces révélations, à lire c’est simplement passionnant.

Le Secret dévoilé : enquête sur les mystères de Rennes-le-Château / Christian Doumergue, Editions de l'Opportun - 2013 ; 630p. - 18,90€

lundi 9 septembre 2013

Druide - Olivier (Oliver) Peru

Sur une terre, 5 “royaumes” : au Nord, les rois du Sonrygar et du Rahimir, toujours en querelle, séparés par une faille immense : la Cicatrice. Au Sud, les Tribus unis (qui ne seront qu’évoquées) et entre les trois, la Forêt, l’espace sacré de neutralité, le royaume des hommes de sèves, les Druides, gardien du Pacte ancien et arbitre des hommes. Le long de leur frontière Est, un mur aux fondations profondes les sépare du Cœur noir de la forêt, royaume d’un être maléfique appelé le Rôdeur, dont l’origine semble provenir de la nuit des temps, et qui hante les contes pour enfants.

Tout d’abord, je me dois de vous parler des Druides puisqu’ils sont au centre de l’histoire. Les Druides possèdent le Don, c’est à dire qu’ils sont sensibles aux ressentis d’autrui et peuvent pénétrer les pensées. Il y a 4 ordres : les Corbeaux, des érudits gardiens du savoir qui s’occupent des bibliothèques, les Ombres qui possèdent le Don le plus développé, pouvant dissocier corps et esprit et se lier avec la forêt, les Cerfs, gardiens de leur cité, la Cité-Racine, et qui veillent aussi sur la Forêt et enfin, les Loups, aventuriers, explorateurs, ceux qui se mélangent parfois aux hommes.

Je ne vais pas vous résumer Druide, ce serait trop vous ôter la découverte d’une histoire complète, complexe et bien montée. Pour faire simple et court : un Druide doit empêcher une guerre et lutter contre un mal ancestral qui menace les royaumes des hommes.

J’ai pu lire certaines critiques, avec lesquelles je ne suis pas d’accord : ce n’est pas cousu de fil blanc, le traître n’est pas simple à découvrir et au contraire, le lecteur ne peut, à l’instar des personnages, ne se fier réellement sur aucun d’eux. L’intrigue est bien menée, en douceur (et cruauté) sur 511 pages. La plume d’Olivier Peru est belle et simple.

Je trouve cet ouvrage particulièrement intéressant pour la figure du Druide. Habituellement guérisseurs, ils sont ici plus juges et arbitres, proches de la nature mais sans paraître irréels, restant tout à fait humains ; ils sont des hommes de biens, pacifiques jusque dans leurs mots. Ils n’engendrent pas (bien qu’il y ait des druides et des druidesses) mais élèvent les enfants abandonnés.

Visuel  de base pour la couverture de "Druide" - par Olivier Peru (ça fait un joli fond d'écran xD)
Druide / Olivier Peru, Eclipse - 2010 ; 511p. - épuisé. (Version poche disponible : 8,90€)


Si vous cherchez une histoire de fantasy, en un volume, d’où se dégage à la fois calme et horreur, une paix de la Nature et la rage des batailles, des histoires de créatures maléfiques et de pouvoirs psychiques… n’hésitez surtout pas, voilà un très bon livre que je vous recommande.

NB : a reçu le prix Imaginales des lycéens 2013 et le prix révélation 2011 des Futuriales.

lundi 19 août 2013

La Wicca

Il y a quelques temps de ça je vous avais promis, suite à une critique, de vous développer ce qu'était la Wicca. Voici enfin cet article.

La Wicca, aussi appelée "Ancienne Religion" ou "Religion des sorcières" est un mouvement religieux fondé par Gérald Gardner dans les années 40-60. Si pour certains elle s'apparente à une secte, c'est pour beaucoup une vraie religion et pour quelques uns une simple philosophie de vie.
La Wicca est basée sur la figure principale de la déesse-mère, la mère-nature à l'origine de toutes choses. Une seconde déité, le Dieu-cornu en est le pendant masculin mais semble avoir moindre importance. La Wicca inclue différents éléments de chamanisme, de druidisme et de mythologies diverses. C'est un culte de la Nature qui s’appuie sur les éléments et leur force.

Le Pentagramme (pentacle car dans un cercle) et l'Arbre de vie : deux symboles de la Wicca

Il existe de nombreuses "sous-branches", appelées "traditions", de la Wicca mais il faut également savoir que la Wicca est une religion où chacun est entièrement libre de sa pratique, où rien n'est figé. C'est "l'esprit" dans lequel vous effectuez les rites qui compte, même si le rituel n'est pas celui "prescrit" au départ. Grâce à cette liberté, beaucoup de Wiccan(ne)s pratique leur religion seul(e), sans être réuni en "coven".

La Wicca, ne l'oublions pas, est "la religion des sorcières". Elle est ainsi profondément ésotérique et chaque "apprenti" ou "initié" peu - sans y être obligé - s'adonner à la magie, (blanche la plupart du temps et de manière originelle) : potions, incantations et sorts seront appris ou créés au long de la vie du pratiquant. Ils seront consignés, avec beaucoup d'autres éléments (comme le journal intime, différents outils allant du calendrier lunaire au pouvoir des pierres et aux vertus des plantes) dans un grimoire appelé "Livre des Ombres". Eh oui! Les sœurs Halliwell sont certainement les sorcières Wiccanes les plus célèbres de notre temps!

La triple lune, symbole de la déesse et des âges : la femme jeunes la femme mûre, la femme âgée.
Pour aborder un côté plus historique et pour approfondir, l'article de Wikipédia sur la Wicca est pas mal du tout. Vous croiserez des noms comme Gerald Gardner, Alastair Crowley, Doreen Valiente, Marie des Bois, Scott Cunningham, etc.
Je précise aussi ici que dans la série Wicca tout est cohérent et que l'auteur n'invente rien de farfelu.

Pour ma part ce que j'apprécie dans la Wicca c'est la grande liberté de croyance et de pratique qu'elle permet, dans un respect total du vivant et de notre environnement. Son credo est d'ailleurs :
"Fais ce qu'il te plaît tant que cela ne nuit à personne."

dimanche 28 juillet 2013

Le Dernier chant d'Orphée - Robert Silverberg

Le mythe d'Orphée est peut-être l'un des plus connus : Orphée, jeune demi-dieu joueur de lyre, tenant son don d'Apollon lui-même est amoureux fou d'Eurydice. A peine sont-ils mariés qu'un accident enlève la vie à la jeune femme. Fou de chagrin, Orphée voyage jusqu'aux Enfers afin de récupérer sa bien-aimée. Là il passe un marché avec Hadès, maître des lieux : Eurydice retournera avec Orphée chez les vivants à la condition que le jeune homme sorte du royaume des ombres sans se retourner. Mais les Dieux, qui décident de nos destinées, jouent autrement et alors qu'Orphée s'apprête à retrouver la lumière du jour, un doute s'empare de lui et il ne peut s'empêcher de vérifier si Eurydice est toujours en train de le suivre. Il la perd fatalement une seconde fois.

Dans ce roman, Robert Silverberg prend la voix d'Orphée et nous raconte toute son histoire à la première personne : sa naissance et, de manière très philosophique ce que signifie être un demi-dieu (Orphée est fils d'une muse), son amour et sa perte d'Eurydice, et puis le reste de sa vie : sa participation à l'aventure de Jason et des Argonautes pour récupérer la toison d'or, sa rencontre avec Ulysse après la Guerre de Troie, le temps qu'il a passé en Egypte, auprès des prêtres de Pharaon... jusqu'à sa mise à mort par les femmes de son peuples, alors qu'il essaie de leur faire comprendre que leur dieu sauvage Dionysos n'est qu'une autre face du dieu pus civilisé qu'est Apollon.

Le discours d'Orphée dans ce roman, outre l'histoire en elle-même qu'il nous conte, est un peu particulier. L'auteur profite de ce statut de demi-dieu pour donner à Orphée une connaissance du monde plutôt philosophique : Orphée a conscience que quel que soit le dieu vénéré, Dionysos, Apollon, Poséidon ou encore Seth, Osiris ou Isis, tous ne sont que les différentes facettes d'un dieu unique, un Zeus tout puissant par qui tout a commencé. De même, pour Orphée, tout semble recommencer à l'infini ou disons plutôt qu'il semble connaître son avenir aussi bien que son passé et que le futur de l'humanité (il fait un moment référence à des philosophes bien plus proches de nous dans le temps). Présent futur et passé se confondent. Je ne me suis personnellement pas arrêté à ces aspects philosophiques que j'ai du mal à comprendre et dont je n'ai pas compris l'intérêt dans ce roman.

Rien de très fantasy ou fantastique non plus ici, si ce n'est le merveilleux intrinsèque à la mythologie. Dans un sens ce roman m'a fait penser à Lavinia d'Ursula Le Guin, où l'auteur raconte l'histoire de ce personnage mythologique à la première personne et d'une manière plutôt réaliste, mis à part quelques fantômes et autres créatures mythologiques. Alors que dans l'interview qui clôture l'ouvrage, l'auteur dit s'attacher à l'humain, ici la figure des dieux et de leur pouvoir de décision sans limite transparaît et semble excusez beaucoup de comportements/décisions humaines sans rien apporter de plus à un roman qui pour moi reste une simple version parmi d'autre du mythe.

Le Dernier chant d'Orphée / Robert Silverberg, ActuSF - 2012 ; 146 p. (+ 30 p. d'interview de l'auteur) - 12€

dimanche 30 juin 2013

Yôsei, le cadeau des fées - Alice Brière-Haquet et Shiitake

Grâce à un petit concours Facebook, où il fallait écrire un modeste poème en 4 vers/phrases dédié aux fées, j’ai gagné cet album superbe de la petite maison d’édition Nobi-Nobi.


Yôsei, le cadeau des fées /   Alice Brière-Haquet, Shiitake, Nobi Nobi ! - 2013 ; 64p. - 16,90€

C’est un ouvrage grand format de 64 pages où nous sont présenté des fées : à chaque illustration pleine page de Shiitake représentant une fée aux grands yeux façon manga répond un texte poétique d’Alice Brière-Haquet.

 


Le format et la mise en page font de chacune de ces fées de vrais trésors. Toutes représentent parfaitement bien le sentiment ou l’état d’esprit qu’elles sont censées incarner. Sans surprise ma préférée est la fée de la mélancolie, aux accents gothiques et aux ailes noires.





Le Poème qui m'a permis de remporter ce livre :

Fées du printemps impatiemment je vous attends,
Fées de l’été s’il vous plaît venez m’aider!
Fées de l’automne en mon cœur vos noms résonnent,
Fées de l’hiver, entendez ma prière

 

samedi 8 juin 2013

Le Miroir aux éperluettes - Sylvie Lainé

Première de mes lectures ramenée des Imaginales. Ce petit recueil de nouvelles nous emmène sur les terres de la rencontre. Les 6 nouvelles sont toutes bien différentes et je leur ai trouvé quelque chose de très féminin. Pour ce qui est du côté « imaginaire », elles interrogent souvent la frontière entre le réel et le virtuel en posant des questions telles que : quel impact physique peut-on avoir dans un monde virtuel ?

La couverture par Gilles Francescano m’a réellement attirée, ainsi que ce thème de la rencontre.

Enfin, la préface de Jean-Claude Dunyach est absolument fabuleuse ! Venez y découvrir le mythe de Wendy, femme aux aspects on ne peut plus modernes…


La Bulle d'Euze
Douce nouvelle avec une rousse et mystérieuse héroïne qui cherche un regard dans un verre et dont le narrateur ne garde d’une brève rencontre qu’un souvenir, plein de tendresse. Une simple rencontre peut changer une vie.

La Mirotte
Seule nouvelle du recueil que je n’ai pas aimé. Il y est question de guérir la cécité par des procédés technologiques… dont les effets secondaires ne sont pas très clairs (disparition réelle ou hallucination, impact du virtuel sur le réel…)

Thérapie douce
Une jeune femme participe à une expérience sur les relations humaines avec un certains Gabriel A. (un ange ?) Drôle de nouvelle… on ne sait pas trop où elle nous mène.

Question de mode
Une jeune femme, banale, ne veut pas céder à la société qui impose de se cacher derrière une apparence trash. Pourtant, par amour, elle va transformer son corps…

Un rêve d'herbe
On ne se méfie jamais assez de qui l’on croise ! Une jeune femme rencontre un bel homme et est irrésistiblement attirée par lui. Il l’emmène dans son jardin où elle s’épanouira réellement… en tant qu’arbre, au milieu d’autres arbres-femmes… qui sera la prochaine ?

Un signe de Setty
Peut-être la nouvelle qui nous plonge le plus dans un futur technologique où chacun peut se créer son monde virtuel. Deux amis, un homme et une femme, vont vivre deux expériences très différentes chacun de leur côté mais face à la même Intelligence Artificielle. Une nouvelle qui interroge plus que jamais sur les frontières entre réalité et monde virtuel (lorsque notre esprit est dans un monde virtuel, notre corps peut-il garder séquelle de ce qui s’y passe ?)

Le Miroir aux éperluettes / Sylvie Lainé, ActuSF - 2007 ; 87p. - 6,10€

samedi 18 mai 2013

Wicca - Cate Tiernan

Morgan est une jeune fille somme toute banale : elle vit dans une petite ville des Etats-Unis, au sein d’une famille catholique (ses parents et sa sœur cadette), et comme toutes jeunes filles de 17 ans, elle va au lycée avec ses amis : le timide Robbie et la magnifique Bree...
Jusqu’à cette rentrée où un nouvel élève, Cal Blaire, va initier Morgan, ses amis et d’autres groupes d’élèves à une étrange religion : la Wicca.

L’histoire est plutôt bien menée, les personnages tout à fait crédibles. La Wicca est au centre de l’histoire : pas tout à fait un personnage à part entière mais, dans ce premier tome une présentation de la “religion” des sorcières, claire et documentée, sans non plus tomber dans le documentaire. C’est une religion basée sur la nature, les éléments et leur force (je vous ferais un article dessus un peu plus tard.)

Tout d’abord, oui c’est un roman étiqueté “jeunes adultes” (et c’en est réellement un!) Ados complexés et surnaturel sont bien au programme ; l’héroïne est banale et tombe amoureuse du nouveau venu - qui est, bien sûr, le plus bel homme au monde - et oh chance! c’est réciproque. Le risque c’est d’avoir, comme pour Twilight (les films) quelque chose de très niais.

Pourtant, attirée par les principes de la Wicca, il y a longtemps que je voulais lire cette série. Et je n’ai pas été déçue.
Ce roman-ci, même s’il a les codes du genre, me semble bien différent. Ici, pas de Bella empotée, pas de créatures si énormes qu’on y croit pas vraiment. Morgan se considère certes comme banale et complexe sur sa poitrine mais l’auteur n’insiste sur ces détails que lorsque cela s’avère utile. Il y a aussi du surnaturel mais amené, il me semble, beaucoup plus finement.

Je dirais donc une série prometteuse.... mais ne pose pas de point final avant d’avoir lu les 3 autres tomes...


Wicca - L'Eveil, T.1 / Cate Tiernan, édition Livre de poche (Black moon/Hachette) - 2013 ; 480p. - 17,25€

dimanche 5 mai 2013

Le Rêve du Prunellier - Rozenn Illiano

A peu près à la même l’époque je découvrais la gamme de jeu Timeline et la couverture de Narcogénèse d’Anne Fakhouri. Je plongeais alors dans le monde artistique de Coliandre (Xavier Collette) et de sa compagne Rozenn Illiano. Je commençais mes lectures avec le Chat qui avait peur des ombres et l’adaptation d’Alice au Pays des merveilles en bande-dessinée (avec David Chauvel au scénario), le Gondolier des ténèbres (Gudule) et le Petit bois du dimanche soir (sans oublier le artbook de Rozenn, Onirography, du nom de son blog), me laissant happer par les illustrations douces et rondes et dont les couleurs rendent si bien les ambiances imaginaires.

J’ai donc “adopté” Rozenn Illiano, via le site "adopte un auteur". Principe très simple : demandez l’adoption d’un auteur, recevez son livre, lisez et critiquez.

Le Rêve du Prunellier est un recueil de 8 nouvelles de fantasy.

Un goût de pluie et de rouille
Cette nouvelle, plutôt ancrée dans notre réalité, nous permet de glisser lentement vers un ailleurs : on y suit une jeune femme sur qui la ville et la grisaille pèsent. Elle semble courir après quelque chose, ou plutôt quelqu’un, comme un amour perdu. Mais dans sa fuite, qui paraît éternelle, sans fin, l’étrange et l’ailleurs rôdent.

J’ai aimé cette nouvelle pour son atmosphère de gare, moi qui adore voyager en train.

Dies Irae
Inspirée par le conte d’Andersen La Reine des neiges, Dies Irae nous montre un autre visage des fées : celle de beautés innocentes, et dont la seule faute est d’être aimées des humains. En effet, dans cette nouvelle, les deux enfants qui s’enfuient de chez la Reine des neiges ont grandit et vivent en ville. Mais le jeune homme est hanté par le souvenir de la Reine des neiges et de son palais de glace...

La forêt d’Adria
Un vieil explorateur découvre enfin la forêt mythique qu’il a recherché toute sa vie. Il y entre et passe dans un monde peuplé d’êtres à la fois enchanteurs et dangereux. On découvre ici une partie de l’univers tissé par l’auteur, on y aperçoit la genèse des Onirographes.

D’hiver et d’ombres
Une jeune fille disparait. En lisant son journal on apprend qu’elle fait des rêves étranges où une fée du froid lui demande son aide. On rencontre ici Layelis, qui est à la genèse de ce recueil. (Voir : http://www.onirography.com/la-genese-du-prunellier/)

Poe
Un vieil enseignant, spécialiste d’Edgar Allan Poe, rend hommage pendant des années à son idole, se rendant à date anniversaire sur sa tombe avec 3 roses rouges et une bouteille de cognac. Mais sa fin est proche et il va alors croiser une créature à la fois admirable et étrange, une ombre qui lui offre son dernier verre et son dernier voyage, une ombre comme tout droit sortie de l’œuvre d’Edgar Allan Poe.

Funambule
Une funambule, perchée sur son fil, regarde du haut de ses buildings, avec mépris et une moquerie violente les pauvres âmes des mortels qui se débattent en vain avant la chute.

Blackthorn
Stygian est une Ombre. Il est celui qui guide toute les Ombres à travers les mondes... ces Ombres qui détruisent les mondes lorsque leur fin est venue. Mais cette fois, c’est la fin de Stygian et de son monde, de celui des ombres. On retrouve dans cette nouvelle toutes les Ombres, fées-corbeaux dont chacune est bien différentes, et on y trouve également le Prunelier, qui est la mère-déesse, mère - nature et dont chaque rêve est un univers. Seule bémol à cette nouvelle : les ombres que l’on y voit, que l’on connait déjà, portent des noms anglais (leur nom dans la nouvelle où on les rencontre, sont en français.)

Layla des Tours
Layla est enfermée dans une haute tour de verre. Elle essaie d’échapper aux Mots, à sa folie, aux autres…



Le Rêve du Prunellier / Rozenn Illiano, Editions Unseelie - 2013, 150 p. - 15€ (version papier ; 5,99 version numérique)
A la fin de ma lecture, je suis on ne peut plus reposée, tranquille : je retrouve enfin une fantasy française de qualité, croisée il y a une dizaine d’année avec Léa Silhol et les éditions Oxymore.


C’est une fantasy réellement poétique. On s’y glisse doucement, comme on entre dans la volupté d’un bain lacté. Les nouvelles sont différentes mais liées intimement par le même univers. Là où Léa Silhol nous faisait épier par un trou de serrure des fées parfois sombres et menaçantes, mais dans un univers où le soleil et sa lumière chaude nous attirait, Rozenn Illiano nous emmène dans l’intimité des fées du froid : la douceur des flocons de neige et le mordant du givre, le mystère des Ombres, ces fées-corbeaux qui sont un peu sa marque, ce qui la distingue des autres univers de fantasy.
Sur son blog, elle explique pourquoi elle a choisi l’autoédition. A la fin de son article, elle se défend de toutes critiques qui pourraient lui être faites : elle n’a pas présenté ses textes à des éditeurs pour des raisons bien particulières et notamment pour les droits, elle ne cherche pas à faire de la littérature mais à partager son univers…. peut-être n’est-il pas besoin mais je voudrais simplement la rassurer ici : ma comparaison avec Léa Silhol n’est pas vaine, il y a réellement une belle écriture et un univers spécifique – et unique ! – dans ce recueil. Pour ma part j’ai envie d’en apprendre plus sur la forêt, les Onirographes et les Ombres…. Je ne sais pas ce qui conviendrait le mieux, un roman ou un livre illustré (Rozenn : je pense que les lecteurs de fantasy adorent les beaux livres illustrés, ceux qui ne se vendent pas… moi la première !)


Le mot de la fin donc : à quand la suite ?

samedi 20 avril 2013

Les Revenants de Whitechapel (Les Enquêtes extraordinaires de Newburry & Hobbes, T1) - George Mann

Sir Maurice Newburry est un gentleman, travaille au British Muséum et est un agent de la Reine Victoria. Son assistante, Miss Veronica Hobbes l’accompagne dans la plupart de ses travaux - sur un mémoire au muséum ou dans ses enquêtes officielles. Ils sont épaulés par Sir Charles Bainbridge, de Scotland Yard.

Et dans ce premier opus, ce ne sera pas une aide de trop : entre un bobby fantôme qui tue les pauvres gens, un dirigeable qui se pose avec perte et fracas dans un parc et une épidémie de “peste” ou plutôt de zombies, apparemment venue des Indes, ils n’auront pas beaucoup de repos... sans compter que Sir Maurice a quelques mauvais penchants qui pourraient lui être fatals.

 
Commençant par une attaque de zombies, j’ai eu quelques difficultés à me plonger dans l’histoire. Mais j’ai toujours un peu de mal avec le début des romans steampunk.

Une fois les deux ou trois premiers chapitres passés, j’étais lancée. Je me suis très vite attachée à ce couple d’enquêteurs, aussi exquis l’un que l’autre. Les différentes enquêtes sont menées de front et toutes avec suspens. Rien à redire, un roman simple à lire, comme je les aime et même une mention spéciale pour la fin où l’on découvre un peu plus encore du personnage de Veronica et de son rôle.


Les Revenants de Whitechapel (Les Enquêtes extraordinaires de Newburry & Hobbes, T.1) / Georges Mann, édition Eclipse - 2011 ; 400p. - 18€